Le Domaine de Freÿr, situé à quelques kilomètres de Dinant, mène depuis plusieurs années un projet ambitieux dénommé « Château Zéro Emissions ». Les travaux viennent d’être terminés. Ils concernent la restauration des bâtiments avec l’amélioration de leur performance énergétique et la purification des eaux usées. Autre fait marquant : le retour d’un pré-verger à proximité du Domaine.
Des chaudières à plaquettes
L’objectif «Château Zéro Emissions » a pu notamment être atteint grâce à l’installation de chaudières à plaquettes (copeaux de bois) à haute performance qui assurent l’alimentation en chauffage de la totalité du château. Ces copeaux sont issus de l’entretien et de la valorisation des bois du domaine ! Pour ce qui est des bâtiments ; toits, charpentes, revêtements de façade et autres menuiseries ont été restaurés selon des techniques artisanales ancestrales. « Ici aussi, nous avons privilégié le circuit court, en travaillant avec des entreprises locales et des artisans locaux » souligne M. Dierckx, architecte responsable de la restauration
Retour dans le temps
Autrefois, le coteau situé à l’arrière des jardins était occupé par des vergers de fruitiers à haute-tige Après des travaux d’envergure (abattage des arbres, évacuation du bois et dessouchage, raclage du sol) des fruitiers à haute-tige ont été plantés. D’ici quelque temps, on pourra y récolter des pommes, des poires, des prunes et des cerises. Et la faune y a également repris ses droits car des moutons paissent paisiblement dans ce pré-verger situé dans un paysage remarquable.
Des colonies de chauves-souris
Le Domaine de Freÿr se distingue grâce à un intérêt écologique majeur. Il est non seulement le repaire d’insectes pollinisateurs, d’oiseaux cavernicoles, de petits mammifères mais aussi de colonies de chauves-souris. Mathieu Halford, conseiller Natura 2000 chez Natagriwal : « Le pré-verger constitue un habitat et un terrain de chasse privilégié pour le Grand Rhinolophe et le Vespertillion à oreilles échancrées (deux espèces rares et menacées). Il est particulièrement bien situé car il se trouve à côté de la « maternité » des chauves-souris : les combles de la grange du château ».
La restauration du Domaine de Freÿr est un projet soutenu par le Fonds Laubespin Lagarde, géré par la Fondation Roi Baudoin (en collaboration avec les services publics de Wallonie).
En pratique :
Le Domaine de Freÿr (château et jardins) est ouvert jusqu’au 15 novembre de 11h à 17h (sa., di. Et jours fériés) ; en juillet et août du mardi au dimanche
Visites sur réservation au +3282/22.22.00 – www.freyr.be – infofreyr.be
FOCUS :
Freyr, 1675, la première tasse de moka en bord de Meuse…
Nous sommes dans les années 1670. En France, Louis XIV est sur le trône depuis 1651 et il en est déjà à sa troisième guerre européenne. Cette fois, il veut à la fois rabaisser la puissance économique des Provinces-Unies (les Pays-Bas actuels) et conquérir nos contrées, sous souveraineté espagnole. Les armées françaises parcourent la province de Namur et en occupent bientôt tout le sud, jusqu’à Lustin et Profondeville. Elles s’y comportent en pays conquis, lèvent des impôts, mettent les forêts en coupe réglée. Cependant, la situation s’éternise et le commerce en souffre, spécialement sur la Meuse, important axe commercial pour les nations ennemies. C’est alors que se négocie le fameux traité de Freÿr…
Ce traité signé le 25 octobre 1675 dans le magnifique château mosan est remarquable à plus d’un titre. Il est en effet conclu en pleine guerre entre les belligérants pour atténuer dans leur intérêt commun les effets économiques du conflit, ce qui traduit une certaine conception de la guerre à l’époque. À titre plus anecdotique, la tradition rapporte que traité le traité de Freyr vit boire la première tasse de café de la région, car un diplomate turc en aurait fait découvrir le goût à la compagnie présente. Le traité est signé entre le sieur Damoresan intendant du roi de France et Philippe Emmanuel Francquen, conseiller et intendant de la province de Namur au nom du roi d’Espagne « pour le rétablissement du commerce entre les sujets de Sa Majesté et ceux du roi catholique dans les Pays-Bas espagnols ». Il s’agit d’abord de rétablir le trafic sur la Meuse, la Sambre et le réseau routier du pays mosan pour assurer les échanges entre la France et les Provinces-Unies. Le traité de Freyr renvoie au tarif douanier existant, mais prévoit des droits particuliers sur certaines marchandises (ardoises, charbon de bois, bois et écorce) ; il organise aussi la perception par les Français du droit namurois du soixantième. Il faut aussi éviter la contrebande, surtout des armements, exempter de charges fiscales les fournitures aux armées, et assurer aux belligérants des ressources financières qui puissent éviter de ruiner complètement les régions occupées. Pour ce faire, le traité renoue avec l’usage des passeports de guerre pour les personnes et les marchandises : vendus très cher, ils seront d’un bon rapport pour les finances…